Ushuaïa et la Terre de Feu

Au dernier épisode, nous venions de passer la frontière argentine et avions trouvé de quoi dormir pour une nuit dans la ville de Rio Grande. Notre but étant d’arriver à Ushuaïa le lendemain en début d’après-midi, après encore approximativement 3h30 de route. Depuis Punta Arenas, Ushuaïa nous fait faire un gros détour de 8h aller et 8h retour. Ce n’est pas tous les jours que nous sommes si proches du bout du monde, et nous ne pouvons donc pas passer à côté !

Fin de la route

La veille au soir, Florian avait repéré sur internet une Estancia sur la route. Pour l’explication, une Estancia est une grande ferme argentine où sont élevés moutons, vaches et autres bêtes. On en trouve partout en Argentine, et cela fait vraiment parti de la culture du pays. La plupart se visitent et certaines proposent même d’y dormir. Le seul souci étant d‘y accéder, car souvent excentrées. Nous décidons de profiter d’avoir une voiture pour y passer, et voir si éventuellement nous pourrions y séjourner dans les jours à venir. L’estancia en question se nomme « Estancia Rolito »

et est située à environ 40 minutes avant d’arriver à Tolhuin. Elle est tenue par Annie et ses enfants, tous installés depuis plusieurs générations en Argentine, mais d’origine française. Par chance pour nous, ils parlent donc français ! Annie accueille bien des visiteurs pour une ou plusieurs nuits, mais ses jours de disponibilité ne correspondent pas aux nôtres. Cependant, celle-ci nous propose tout de même de venir manger un midi et de visiter la ferme à notre retour d’Ushuaïa. Le rendez-vous est donc pris pour dans 5 jours !

Sur le reste de la route, nous en profitons pour nous arrêter à de nombreux points de vue : les paysages alentours sont magnifiques. Les longues plaines désertiques du début de la Terre de Feu laissent place à de superbes montagnes enneigées entourées de lacs. Nous arrivons à Ushuaïa vers 13h, directement à notre Airbnb que nous avions réservé 2 jours plus tôt. L’appartement en question est un petit havre de paix : neuf, propre, chauffé, bien aménagé, et avec une superbe vue sur le canal de Beagle, on sent qu’on va se plaire ici ! Erika la propriétaire nous confie d’ailleurs que nous sommes ses tous premiers locataires !

On est au bout du monde ! (ou presque…)

L’après-midi, nous décidons d’aller nous promener dans la ville. Il y a encore quelques années, Ushuaïa n’était qu’une ville portuaire sans grand passage, connue principalement pour sa prison du bout du monde. Mais depuis peu grâce au tourisme la ville s’est complétement métamorphosée. Cela se sent d’ailleurs dès que nous entrons dans le centre : les rues sont pleines de restaurants, auberges et boutiques de souvenirs.

Après avoir pris quelques informations sur les balades à faire pour les jours à venir, et surtout après avoir fait tamponner notre passeport du tampon Ushuaïa à l’office du tourisme, nous ne résistons pas à l’envie d’aller prendre notre photo devant le fameux panneau : « Ushuaïa, fin del mundo ». Et pourtant, malgré sa réputation de « ville la plus australe du monde », elle ne l’est pas vraiment… En vérité, ce titre devrait revenir à la ville de Puerto Williams, une ville située de l’autre côté du canal de Beagle, du côté chilien. Cependant pour y accéder en bateau depuis Ushuaïa, il faut débourser pas moins de 250 dollars américains par personne… On passera donc notre tour cette fois-ci.

Dans la ville, nous nous amusons également à repérer tous les panneaux d’indications kilométriques. Il y en a plusieurs de différentes sortes, et certains sont bien cachés, mais aucun ne résistera à l’objectif de notre appareil photo. Nous profitons également de la magnifique vue que la ville offre sur la canal de Beagle, et on se plait à imaginer qu’au loin là-bas se trouve le Cap Horn… Il est possible d’aller faire une croisière sur le canal pour aller voir une colonie de lion de mer et le fameux « phare du bout du monde », mais le prix de l’excursion aura assez vite fait de nous dissuader..

Randonnée dans le parc de la Terre de Feu

En dehors de son statut particulier, Ushuaïa est également connue pour être à proximité du parc national de la Terre de Feu, d’où il est possible d’effectuer plusieurs randonnées. Encore une fois notre voiture nous permet de nous y rendre rapidement, mais il est possible de prendre des navettes depuis le centre ville.

Comme nous sommes encore en fin de saison hivernale, l’accès au parc n’est pas payant. En revanche, plusieurs sentiers sont fermés et nous nous retrouvons avec un choix assez limité de randonnées possibles. Parmi celles-ci, nous choisissons de faire celle de Hito XXIV, qui permet de se rendre jusqu’à la ligne de frontière entre le Chili et l’Argentine. La balade dure 3h aller-retour, et est plutôt facile. Sur place, nous en profitons pour pic-niquer et pour traverser (illégalement  !) la frontière le temps de quelques minutes.

Au retour, nous nous arrêtons au glacier Martial, d’où partent quelques unes des pistes de ski d’Ushuaïa. A cette époque de l’année les remontées mécaniques ne fonctionnent plus et nous faisons donc la montée à pied ! C’est un peu physique, mais d’en  haut nous sommes récompensés par la superbe vue sur la ville et sur le canal de Beagle, ainsi que sur le glacier. Nous redescendons juste à temps en ville pour récupérer notre linge déposé la veille à la laverie, et rentrons manger une bonne raclette improvisée cuisinée par Florian (pas d’appareil, mais le rendu du fromage coulant sur les pommes de terre s’en rapproche grandement :D).

Le lendemain, nous quittons déjà notre Airbnb et retournons à nouveau dans le parc de la Terre de Feu avec pour objectif de camper à l’intérieur le soir venu. Mais avant cela, nous profitons d’être encore en ville pour faire un arrêt… empanadas ! Cette spécialité argentine ressemble à des croissants feuilletés, fourrés à ce que l’on souhaite (viande, fromage, légumes). Ceux du restaurant « Ushuaïa Empanadas » sont un vrai délices, on se régale !!

Pendant l’après-midi, nous faisons les autres courtes randonnées ouvertes du coin, dont une marche vers un barrage de castor. Pour la petite histoire, dans les années 1945, une quarantaine de castors ont été introduits depuis le Canada pour la production de fourrure. Le résultat obtenu a été catastrophique : en l’absence de prédateurs, ceux-ci ont proliféré à une vitesse folle, et sont devenus une vraie plaie pour le parc, détruisant tous les arbres du parc et des alentours. Une campagne d’extermination a été lancée pour réduire leur nombre et maitriser leur reproduction, mais les dégâts effectués sont déjà impressionnants à voir… Dans le même coin, nous tombons aussi sur le panneau de fin de la fameuse route 3, qui débute à Buenos Aires et se termine ici après plus de 3074km. C’est également la fin de la fameuse route panaméricaine, qui commence plusieurs dizaines de milliers de kilomètres plus haut… en Alaska !

On sort les tentes !

En fin d’après-midi, après avoir fait toutes les ballades du coin, nous nous arrêtons au niveau de l’aire de camping gratuite du parc. Il existe également un camping payant avec commodités dans le parc, mais celui-ci était fermé à notre passage. Après une courte averse, le soleil fait son apparition : c’est l’heure de monter nos tentes. Nous profitons des dernières lueurs du jour, avec un superbe coucher de soleil derrière les montagnes. Nous sommes les seuls à rester dormir ici ce soir, ce qui nous donne vraiment l’impression d’être seuls au monde ! Nous avons la nature pour nous tous seuls et il n’y a aucun bruit… jusqu’à un gros « boum » survenant de nulle part dans les montagnes. Nous nous renseignons auprès d’une voiture de rangers passant à proximité, mais eux non plus n’en connaissent pas la provenance. Très rassurant tout ça ! Au final, nous apprendrons quelques instants plus tard que l’explosion venait du côté chilien de la montagne : ces derniers étaient en train d’aménager un chemin dans la forêt, mais avaient oublié d’en avertir le parc argentin…

Pour notre repas du soir en pleine nature, on fait assez simple (mais efficace!) : pâtes sauces tomates ! Une fois le soleil couché, les températures commencent à descendre très vite, et nous essayons donc de manger le plus chaud possible pour avoir des forces pour la nuit à venir. Après une vaisselle improvisée dans la rivière d’à côté (humm les bonnes mains gelées), nous ne trainons pas et allons nous mettre rapidement au chaud sous nos duvets. Impossible de dire qu’elles ont été les températures dans la nuit, mais nous avons eu très, très froid ! Dur de dormir dans ces conditions, et heureusement que la voiture n’était pas loin au cas où cela serait devenu trop insupportable. Au petit matin, les premiers rayons du soleil auront eu le mérite de réchauffer assez vite la tente à notre réveil, nous permettant de tout ranger sans être encore trop gelés.

En fin de matinée, nous profitons de repasser par Ushuaïa pour nous faire un bon petit restaurant italien au chaud. Nous souhaitions également poster quelques cartes postales, mais le prix des timbres argentins nous aura très vite dissuader… A 4,5 euros le timbre vers l’international, ça calme.

Dans l’après-midi, nous faisons un petit détour vers l’est afin d’aller voir les arbres penchés. En raison des vents violents constants dans cette partie du pays, les arbres ont fini par pousser de travers ! On a alors l’impression que ceux-ci sont constamment penchés à cause du vent, alors qu’ils ont tout simplement poussé de cette manière. C’est assez impressionnant à voir, et le détour en valait la peine !

Arrivés au vrai bout du monde…

En fin d’après-midi, nous arrivons vers la petite ville de Tolhuin, où nous avions repéré un camping pour y passer la nuit. Nous débarquons donc au camping Hain au bord du lac Fagnano. Son propriétaire, Roberto, nous fait visiter le coin camping où nous passerons la nuit. Alors là, autant Ushuaïa peut prétendre au titre de « ville la plus australe du monde », autant le VRAI bout du monde, c’est ici ! Le camping et les infrastructures ont été construits entièrement par Roberto, en utilisant que des matériaux recyclés ou du bois. On reste admiratif devant le travail effectué, même si cela donne un air post-apocalyptique au camping, de fin du monde quoi ;). En cas d’invasion zombies, nous sommes certains que Roberto pourrait survivre pendant des années ici ! Nous n’aurons jamais eu autant l’impression d’être perdus à l’autre bout du monde !

La cerise sur le gâteau reste tout de même les tipis en bois que Roberto a mis en place. Cela permet de mettre sa tente en dessous et de se protéger de la pluie et du vent. Une idée de génie qui a le mérite d’être vraiment très originale ! Dans la cuisine, nous trouvons un feu de bois allumé spécialement pour nous, où nous nous réchauffons, entouré de dizaine d’écriteaux signés par tous les voyageurs qui sont déjà passés par là. Le style est particulier, on aime ou on n’aime pas, mais en tout cas on ne peut pas dire que ce n’est pas original !

Nous passons une bonne nuit, abrités du vent par nos tipis, et repartons le lendemain matin, tout de même contents d’avoir découvert cet endroit, ce petit bout du monde de l’autre côté de la planète…

Visite de l’Estancia Rolito

Vers 11h du matin, nous voici de retour à l’Estancia Rolito, où nous avions pris rendez-vous pour le déjeuner quelques jours plus tôt. Annie nous reçoit avec son fils Jorge, et nous fait faire une visite de son hangar de tonte à mouton avant de manger. Tous les animaux sont tondus à la main, nous donnant l’impression de faire un saut en arrière dans le temps en voyant les infrastructures et les outils utilisés.

Ces dernières années, leur production de laine de mouton a énormément diminué. La faute aux chiens sauvages qui descendent des villes alentours pour venir chasser et tuer les moutons. Cela semble être une vraie plaie pour les estancias du coin, et celle d’Annie ne serait pas la seule à souffrir de ce problème. Annie arrive toujours à produire plusieurs kilos par an, mais cela ne peut plus suffire à faire vivre la ferme. Par conséquent, comme beaucoup d’autres, l’Estancia s’est ouvert au tourisme afin de trouver une autre source de revenus. Après cette visite très intéressante, nous passons à table en compagnie d’Annie et de son fils. Tout a été préparé maison avec des produits locaux, et c’est un délice ! Pendant ce repas, nous discutons beaucoup de l’Argentine, de la relation avec le Chili, et des problèmes de corruption politique qui avaient encore lieu il n’y a pas si longtemps dans le pays. Un échange très intéressant, pouvoir parler français avec Annie est vraiment un gros plus. A la suite du repas, Jorge nous emmène faire un tour sur le terrain de l’Estancia. C’est vraiment immense, on a du mal à imaginer tout l’espace leur appartenant !

Comme il nous reste encore pas mal de chemin à parcourir avant la nuit tombée, nous repartons vers 15h de l’estancia. Nous avons beaucoup apprécié cette visite et cet échange. C’était un moment de partage très enrichissant, et nous remercions encore grandement Annie et Jorge pour leur accueil !!

Vers 17h, nous repassons à nouveau la frontière avec le Chili. Vers la nuit tombée, nous cherchons un endroit pour dormir mais les rares auberges en Terre de Feu dans la ville de Cerro Sombrero sont hors de prix. Finalement, comme la route est encore longue jusqu’à notre prochaine étape à Puerto Natales, les garçons se motivent à conduire toute la nuit jusque là-bas. Après plusieurs pauses en bord de route pour dormir, et une nuit entière dans la voiture, nous arrivons à 07h du matin à destination.

Et c’est une épreuve toute particulière qui nous attend ici…. En effet, d’ici 2 jours, nous nous apprêtons à commencer notre trek de 5 jours dans le parc du Torres del Paine. La suite au prochain article !

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Coin pratique

1 euro ~ 740 Pesos Chiliens ~ 20 Pesos Argentins

Estancia Rolito : Sur la route vers Tolhuin, panneaux indiquant l’accès. Possibilité de rester dormir.

Parc national de la Terre de Feu : A 30min du centre, accès gratuit en basse saison.

Arbres penchés : A 1h de Ushuaia, sur la route de l’Estancia Habertton.

Restaurants :

Ushuaïa Empanadas: de 40 à 45 pesos la pièce. Trop bon !

Logement :

Airbnb chez Erika à Ushuaïa : 50 euros la nuit en petit studio. Moderne, propre et très bien situé.

Camping Hain : 150 pesos la tente. Atypique, mais avec toutes les commodités suffisantes pour une nuit ou 2 !

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